Le Monde vient de publier une série d’articles traitant de l’épuisement des adresses IPv4 et de la transition vers IPv6 vus par les fournisseurs d’accès à Internet français. L’article « Comment Internet mue vers sa nouvelle version » présente les principaux enjeux de la transition (avec quelques imprécisions : une adresse n’est pas une plaque d’immatriculation) et rappelle que le registre européen (RIPE) distribue actuellement ses dernières adresses IPv4.
Face à la pénurie qui s’annonce, les « gros » opérateurs ont déjà mis en oeuvre des solutions de contournement, dont notamment la translation d’adresse au niveau de l’opérateur (CGN). Dans l’article « L’astuce des opérateurs pour ralentir l’évolution d’Internet« , les responsables d’opération chez Orange et SFR expliquent que par rapport à une mise à niveau en IPv6 de l’ensemble de l’infrastructure, ces solutions sont moins coûteuses. Mais l’article rappelle les conclusions du dernier colloque FrNOG, notamment que ces dispositifs accroissent considérablement la complexité du réseau.
Cette situation amène à une sorte de fracture entre les « gros » opérateurs et ceux de taille plus modeste, comme illustré dans l’article « Comment la pénurie d’adresses IP profite aux gros« . Ces opérateurs locaux n’ont pas les réserves d’adresses IPv4 pour continuer à croître et à innover. De plus, le passage à IPv6 demande un certain niveau d’investissement qu’ils ne sont pas forcément prêt à assumer (même si des solutions de transitions comme NAT64 pourraient s’appliquer dans leur cas).
La stratégie d’Orange, exposée lors du colloque « IPv6 Opérationnel » à Caen au mois de Juillet 2012, justifie une transition lente vers IPv6 en considérant que leur réserve d’IPv4 permet une continuité opérationnelle jusqu’en 2020. En conséquence, leurs clients n’auront pas de raison de sortir de leur addiction à IPv4 et ne développeront pas de nouveaux besoins en IPv6. Il existe donc une menace pour les petits opérateurs de ne pas pouvoir suivre la demande et à moyen terme de disparaitre.